Benedicta honyiglo

Portrait – Da Massan, la taxiwoman

Taxiwoman? Oui, monter dans un taxi avec une dame comme chauffeur, c’est un vrai délice. Place à Da Massan, la taxiwoman, dans les rues de Lomé la belle.

Note de l’auteur : ce portrait est une pure fiction. 

Dans les rues de Lomé. Source : Benedicta H.
La routine matinale

Du haut de ses 42 ans, Da Massan a déjà eu plusieurs carrières. Elle a d’abord été comptable dans une société de BTP de Lomé. Suite à son licenciement et n’ayant plus les moyens de subvenir à ses besoins et à ceux de sa famille, elle eut l’idée de devenir « taxiwoman ». Elle a passé son permis de conduire. Son mari qui vit en Europe lui a envoyé une voiture de marque japonaise, très connue. Son aventure dans ce monde très masculin, a commencé voici 4 ans déjà.

« Mon réveil est à 5 heures. Après ma prière matinale, je m’occupe de ma voiture. Je procède aux vérifications habituelles : niveau d’huile, d’eau, du carburant, état de la batterie », explique-t-elle. Elle précise qu’elle en prend le plus grand soin car c’est son gagne-pain. Ensuite elle réveille ses enfants : Delali, 10 ans au CM1 et Mawuena 8 ans au CE2, pour les préparer pour l’école.

Taxi. Source : Pixabay.com
En voiture !

C’est après avoir déposé ses enfants à l’école que la journée de Da Massan commence. Elle habite à Adidogomé, un quartier en banlieue Nord-Ouest de Lomé. « Sur ce tronçon, il y a énormément de clients, mais aussi beaucoup d’embouteillages, compte tenu de la grande population qui y habite. »

Certains clients lui sont devenus familiers, car ils empruntent régulièrement son taxi. Le trajet habituel est Adidogomé-Assiganmé, qui coûte 400 francs CFA.  Parfois des clients ne font pas le trajet complet. Ce qui fait les affaires de Da Massan, le terminus étant Assiganmé, le grand marché de Lomé.

Les qualités de la bonne taxiwoman

Da Massan est devenue une experte du volant avec les motos taxi ou zémidjans qui pullulent à Lomé et font du slalom à tout vent. Elle est toujours sur le qui-vive.

Être conductrice de taxi, est aussi un véritable parcours du combattant : entre le harcèlement des policiers qui vous demandent « leur billet bleu[1] pour le café » à tout va, sans vérifier les pièces du véhicule ; l’achat des tickets de la mairie ;  l’achat des tickets des syndicats des chauffeurs de taxi et en dernier, ceux de la direction des impôts. Da Massan, avec le temps, est devenue patiente et courageuse pour affronter toutes ces tracasseries quotidiennes.

Les bons côtés du métier

Malgré le prix du carburant qui ne cesse de faire le yo-yo, la concurrence des taxis moto et les prix cassés des bus de la Sotral (Société des Transports de Lomé), Da Massan arrive toujours à tirer son épingle du jeu.

Et il y a aussi quelques belles rencontres. « Il y a 2 ans, j’ai pris une dame à bord de mon véhicule, qui accompagnait sa sœur à terme, à l’hôpital pour accoucher. Pressées qu’elles étaient et vu l’urgence de la situation, l’accompagnatrice a oublié son téléphone portable dans mon taxi. Par un coup de chance, j’ai récupéré l’appareil qui était celui de la future maman et sur lequel le mari n’arrêtait pas d’appeler. J’ai répondu à l’appel et rejoins le mari, pour l’amener à l’hôpital. L’accouchement se déroula sans problème. Ce fut une fille dont je devins même la marraine. Depuis, une belle amitié est née entre cette famille et moi. »

L’avenir du métier

Da Massan n’est pas pressée de quitter ce métier, car elle s’y sent bien. Il y a même un projet qui germe dans sa tête : celui de développer une entreprise de taxis privés. Elle se donne encore quelques années pour le réaliser. Mais en attendant, vive les rues de Lomé !

[1] La coupure du billet de 2000 FCFA (XOF) est de couleur bleue et équivaut à 3,075 Euros


Pourquoi j’ai mis du temps à m’intéresser à la CAN 2019

Bientôt trois semaines que la 32e édition de la Coupe d’Afrique des Nations de football a commencé au pays des pyramides et des pharaons. Je n’ai commencé à m’y intéresser que cette semaine, et ça ne m’a pas réussi… 

Habituellement, lorsqu’il y a une compétition de football internationale (Coupe du monde, Ligue des champions européenne ou Coupe d’Afrique des Nations) je ne rate aucune occasion d’être au courant des nouvelles : calendrier des matchs, pays qualifiés, sélectionneurs, joueurs vedettes… Ce qui n’a pas du tout été le cas pour cette CAN égyptienne.

L’une des raisons principales est que le Togo, mon pays d’origine, n’est pas qualifié. Ensuite, j’ai décidé de ne plus soumettre mon corps à de fortes émotions parce que cela n’est pas à mon avantage. Mais puis-je échapper à cette forte ambiance plus que fiévreuse ? Hélas non…

D’abord le Ghana…

Lundi, j’ai « suivi » malgré moi le huitième de finale Ghana-Tunisie. Seulement la deuxième mi-temps en plus. Les cris montaient dans le quartier au moment où les Black Stars rataient une belle occasion. Ça me tentait tellement, comme un gâteau au chocolat interdit à une personne qui suit un régime pour maigrir… Je n’ai pas résisté. Je supportais évidemment le Ghana. Pourquoi le Ghana ? Parce que par ma mère, j’ai des origines ghanéennes. Et comme le dirait si bien un vieux dictateur africain décédé, lorsque la case de ton voisin brûle, cours vite l’aider à éteindre le feu… Donc le Ghana en compétition, c’est le Togo.

Ce fameux match, je l’ai suivi seulement en audio malgré la télévision allumée à quelques mètres de moi. C’est moins intense quand j’entends seulement, je ne juge pas les joueurs sur les actions posées ni sur les gestes manqués.

Finalement, ma déception a encore été plus grande face à l’échec du Ghana, vaincu aux tirs aux buts. J’avais pourtant juré que l’on ne m’y prendrait plus mais…

… et maintenant le Bénin !

A ce moment-là, je me disais qu’il restait encore un voisin du Togo en compétition, le Bénin. Et vous me voyez déjà afficher un sourire en coin. Entre les éperviers et les écureuils, c’est une longue histoire de désamour, qui mériterait bien un autre billet ! Mais le Sénégal l’a emporté 1-0 hier soir face au Bénin…

Résultat, je n’ai pas encore trouvé l’équipe que je dois supporter. Bonne chance aux équipes encore en compétition, en attendant pour moi de décider si je dois suivre le reste des matchs.


Un mouton récidiviste s’évade

Finalement, j’ai décidé de le faire. Je ne suis ni militante de la Société Protectrice des Animaux (SPA), ni membre du FBI (1) , du CSI (1) ou du SWAT (1) . Pourtant j’ai pris la ferme résolution (pas celle de l’ONU) de résoudre « Le mystère du mouton perdu du Cepd ».

Depuis quelques heures, la toile togolaise a pris feu avec « Le moutongate ». D’accord, je vous éclaire pour éviter que vous preniez des vessies de mouton pour des lanternes.

Par une brumeuse journée (normal, on est en pleine mousson), sous le ciel togolais, une épreuve de rédaction française tomba. Tel un poil (de mouton) dans la soupe des élèves du CM2 candidats au Cepd (examen de fin du cours primaire). Devrais-je dire que celui (je suis sûre que c’est un homme !) qui a composé l’épreuve avait certainement un poil dans la main ?

Voici le libellé de l’épreuve (photo ci-dessous).

Crédit photo : Source inconnue, vu sur whatsapp

Avant d’évoquer la thèse de l’introduction d’un loup (y a-t-il des loups sous nos cieux ???) dans la bergerie la maison, pour faire fuir le mouton, la première question que je me pose :

– Le père a-t-il prémédité la fuite du mouton en le « mal attachant » ?

Ensuite, le père connu pour être un abonné des séries policières américaines et ayant surpris à plusieurs reprises le fils en train de suivre en douce ces séries a-t- il voulu tester les qualités dissimulées  d’enquêteur dudit fils ??

En tout cas, s’ils avaient été disciples de Jésus, ces mioches (le fils et ses camarades) auraient eu la tâche allégée. Le Maître serait parti a la recherche du célébrissime mouton.

Malheureusement, les camarades du fils  du père (et pas le St Esprit), l’ont suivi comme des moutons de Panurge pour retrouver le fameux bestial.

A mon avis, cela aurait été plus simple pour ce père d’aller directement au marché de Gbossimé (marché de bestiaux à Lomé) pour acquérir un nouveau bovidé.

Aujourd’hui où il est vraiment possible de munir n’importe quel animal de GPS, je me demande bien pourquoi ce père inconscient n’en a pas fait usage ?

Il est même possible qu’en une semaine, M. Le mouton ait perdu du poids, n’étant plus habitué à être nourri. Il est rendu à l’état semi-sauvage. C’est de notoriété publique que de nos jours, trouver sa pitance quotidienne est un chemin de croix. Sa physionomie aurait changé. Et celui qui a dit « Quelle que soit la physionomie du mouton, la fête aura lieu » va s’en mordre les doigts. Ce mouton aura changé d’apparence et la fête est déjà à l’eau.

Quoiqu’il en soit, moi, j’accuse fortement ce père irresponsable et négligent de n’avoir pas devancé les événements. Un magnifique selfie du bovidé accompagné d’un audio, qui aurait été « mê tcha tchatcha » (2) aurait certainement facilité les recherches.

En attendant, rien n’est encore tout à fait perdu. En tout cas pas pour le mouton. Mais que dis-je ? Bon, passons. Si après toutes ces quêtes, le môme et ses compagnons ne retrouvent pas Shaun le mouton, alors le père peut appeler le 911, non on est au Togo, le 118. Les pompiers vont se casser un peu le c…. A moins que le mouton, ô mon cher mouton, n’ait atterri depuis dans la marmite d’un de mes concitoyens.

Shaun, le mouton. Crédit photo : Aardman Animations Ltd

J’ai sauté du coq au mouton, à l’âne.

PS : Avant la mise en ligne de ce billet, j’ai appris que le mouton n’en était pas à sa première évasion, d’où le titre. Il a été vu aux alentours de Kparatao (3), il a « zewa (4) »Lomé.

(1) FBI : Federal Bureau of Investigation, CSI : Crime Scene Investigation, SWAT : Special Weapons And Tactics : des unités de la police américaine.

(2) Mi mê : partagez, tcha tcha tcha : sur le champ, vite vite, en langue mina du sud Togo. Mi mê tcha tcha tcha, Slogan des adeptes des réseaux sociaux,  spécialistes des partages à tout va des posts, images et audios.

(3) Kparatao : Ville du nord Togo d’où est originaire l’opposant Tikpi Atchadam à l’origine des mouvements du 19 août 2017.

(4)Zewa : fuir, mot d’origine kabyè, ethnie du nord Togo.

 


On retient notre souffle pour le match Argentine-Nigeria

Les Super Eagles disputent leur dernier match de poule contre l’Argentine aujourd’hui à 18h TU. Notre souffle sera court. Un match de football n’est jamais un problème de mathématiques, tous les retournements de situation sont possibles. Trois équipes africaines ont déjà fait leurs valises : le Maroc, la Tunisie et l’Egypte. Mais les compagnons de John Mikel Obi sont encore dans la place.

Crédit photos : www.lesvoyagesenballon.fr / Stefan Heunis

A la différence des autres continents, l’Afrique est souvent derrière ses équipes. Ces dernières, loin de porter sur leurs épaules l’espoir de leur seul pays, portent aussi l’espoir d’un continent, en tout cas celui des Africains amoureux du ballon rond. A ce moment de la compétition, il n’y a plus de frontière : qu’on soit Ghanéen, Togolais, Camerounais, Kenyan ou Sud-Africain, tous les regards et les espérances sont tournés vers les poulains de Gernot Rohr.

Après leur prestation décevante face à la Croatie et la revanche prise contre l’Islande, l’exploit de la victoire est possible contre les compères de Léo Messi.

Victor Moses, l’attaquant de Chelsea FC, doit faire éclore tout son talent, ainsi que Ahmed Musa, le double auteur contre l’Islande. Les Super Eagles doivent survoler la défense argentine qui comptera certainement sur les talents de Javier Mascherano, Marcos Acuna ou Gabriel Mercado  pour lui faire barrage.

Au compteur, la rencontre de ce soir sera la 6e confrontation entre l’Albiceste et les Super Eagles, avec 3 victoires pour l’Argentine et 2 pour le Nigeria. Une victoire des Super Eagles égalisera la balance. J’attends une excellente prestation des Nigérians, qui me fera hurler de joie et péter mes cordes vocales…

Et cette chanson sera la prophétie réalisée pour les argentins.

Si les Super Eagles échouent à se qualifier, il ne restera plus que le Sénégal pour espérer voir une équipe africaine en huitièmes de finale.


Top départ pour la Coupe du Monde de Football 2018

Plus que 48 heures avant le début de la grande messe mondiale du football. Cette discipline sportive a une place importante dans  le cœur de beaucoup de terriens. La coupe du monde ? Un événement sportif qui a lieu tous les 4 ans au milieu de l’année. Sauf pour 2022, chaleur du Qatar oblige, nous suivrons les matchs entre le 21 novembre et le 18 décembre. Mais cette année, les équipes du monde entier poseront leurs valises au pays des Soviets, de Lénine, Staline, Gorbatchev… et Poutine.

Credit photo : pixabay.com
Crédit photo : pixabay.com

Depuis quelques années, je ne m’intéresse plus tellement au football afin d’éviter de mourir d’un accident vasculaire cérébral(AVC) en cas de défaite de mon équipe fétiche. Parent, je ne veux pas laisser mes enfants orphelins. Ma passion a également diminué à cause des sempiternels déboires de notre équipe nationale : les Éperviers du Togo. Pour toutes ces raisons, j’ai préféré ranger mon fanatisme « footballistique » au vestiaire.

Mais cette année, je pense que je vais m’y intéresser un peu puisque le pays hôte est un pays qui m’a toujours intrigué, les habitudes des russes sont si peu communes, et leur chef d’Etat est tout aussi mystérieux.

Credit Photo : AFP, Ekaterina Chesnokova
Crédit Photo : AFP, Ekaterina Chesnokova

Les rencontres de football seront aussi l’occasion de partager des fous rires et de l’émotion avec les amis et la famille. Des rencontres insolites, des amitiés par affinités  vont se créer, c’est sûr.

Je ne me suis pas encore décidée, vais-je suivre les matchs à la maison ou ailleurs ? Chez moi pas d’aficionados de foot,  que des télénovelistes ! On se retrouve seul comme Gulliver au pays des lilliputiens.

Ceux qui ont les moyens feront l’acquisition d’un 2e poste de télévision pour éviter la guerre de la télécommande. Plusieurs boutiques de vente de matériels technologiques ont commencé leur promotion depuis un moment.

Pour cette coupe du monde, mon équipe « sans autre rivale » c’est les « Super Eagles » du Nigéria, je verrai après si une autre ravira mon cœur au cours de la compétition.

Les Super Eagles du Nigeria /Crédit photo : Fédération Nigérianne de Football

A n’en pas douter il y aura de belles surprises, des anecdotes sur les différentes équipes, à la fois sur les habitués et sur ceux qui font leurs premiers pas dans cette compétition : l’Islande et le Panama.

J’espère vivement que cette fois-ci la définition qui dit qu’ « une coupe du monde de football est une compétition sportive qui a lieu tous les quatre ans et à la fin c’est l’Allemagne qui l’emporte » ne sera pas vérifiée !

Bonne compétition à toutes les équipes engagées !
Que le meilleur gagne !


Une journée avec les Catalyseurs

Quand on parle de catalyseurs, vous pensez à vos cours de chimie, n’est-ce-pas ? Et bien ce coup-ci, c’est raté !

Ces catalyseurs-ci ne sont pas du monde des sciences, mais un rassemblement de jeunes engagés, venant de divers horizons, vêtus d’une ferme conviction et de la même vision pour le continent africain : le développement de l’Afrique par les africains.

La genèse de l’initiative

Le Catalyseur est une initiative née sous l’impulsion d’un Togolais vivant aux  États-Unis d’Amérique, Richard Homawoo, coach en développement du potentiel humain et de l’entrepreneuriat. Ce dernier a créé un groupe virtuel sur l’application Télégram,  le 26 Octobre 2017 pour partager sa vision positive de l’Afrique. Celle d’optimiser le cœur et l’esprit  de ses frères et sœurs africains en visant différentes cibles :

  • Les enfants (par la littérature, la culture, l’art, les jeux pour le bien-être de l’enfant)
  • Les étudiants ( pour la réussite de leurs études et carrières)
  • Les jeunes entrepreneurs (par l’accompagnement des futurs entrepreneurs sur leurs projets en les confiant aux personnes ressources, pour des conseils et leur trouver dans la mesure du possible des partenaires financiers)

Ainsi donc les deux piliers essentiels du Catalyseur sont le développement personnel et la création d’entreprises.

Le fonctionnement du groupe

L’animation est quasi-permanente dans le groupe qui comprend une demi-douzaine de pays (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Mali, Niger et Togo) avec plus de 700 membres.  Le Catalyseur a un programme bien défini : conférence-débat sur des thèmes de psychologie, de développement personnel et d’éducation ; promotion de produits locaux ; partage d’idées, de citations de motivations ; discussions.

Chaque jour de la semaine étant réservé à une activité particulière pour éviter l’embouteillage du réseau et la saturation du groupe par les images, les vidéos et autres sujets n’ayant aucun lien avec les objectifs du groupe. Tout contrevenant aux règlements du groupe est soumis à des sanctions qui vont du rappel à l’ordre à l’éviction pure et simple du groupe. Les administrateurs étant très stricts sur ce point.

La rencontre proprement dite

Après plus de 6 mois de discussions virtuelles, les responsables ont initié cette 2e rencontre physique du groupe, (la première rencontre ayant eu lieu en 2017, comme prise de contact). Elle est placée sous le thème « Agir pour Réussir », pour lancer concrètement les activités. Cela a permis aux différents membres du chapitre local togolais qui comprend plus d’une centaine de personnes, de se voir enfin et de mettre sur pieds un bureau exécutif.

Public attentif à une présentation. Crédit photo : Angelo PADABADI

Cette conférence qui a eu lieu le 05 mai 2018 dans la périphérie de Lomé, a vu la participation de près d’une cinquantaine de personnes de milieux différents : des entrepreneurs jeunes pour la plupart, des ingénieurs informaticiens, des professeurs d’université, des étudiants, des coachs, des acteurs culturels, des artistes, bref un parterre hétéroclite de participants.

Ce fut l’occasion de présentations d’exposés sur la genèse du groupe,  de partages d’expériences et de motivations pour l’assemblée présente, ponctués d’intermède animé par un artiste chanteur et un slameur.

Après une séance de campagne et de vote, un bureau exécutif de 8 membres a pu être élu. L’exposition et la vente de pagnes en batik par une jeune entrepreneure de Lomé, Val Batik, a suivi l’élection du bureau.

Photo de famille. Crédit photo : Angelo PADABADI

Pour garder des traces de l’événement, une photo de famille a clôt cette rencontre, riche en expériences et qui lance effectivement les activités des Catalyseurs du Togo. Avec foi, que cette initiative portera effectivement ses fruits grâce à cette vision panafricaniste qu’ont véhiculé les pères des indépendances africaines.

Le Bureau Exécutif élu. Crédit photo : Angelo PADABADI


Ma rencontre avec le diable (II)

La chambre était éclairée par une lumière blafarde. Mes yeux, tout juste remis du supplice du foulard, eurent encore du mal à s’habituer à la pénombre. Je m’avançai avec précaution.

Crédit photo : Pixabay.com
Crédit photo : Pixabay.com
  • Asseyez-vous ! rugit « M. Borsalino »

Il m’indiqua un meuble. A peine me suis-je assise, qu’une lumière drue tomba du plafond sur moi. Je cachai mes yeux avec mes mains. Je les ouvris peu à peu pour m’accommoder à cette illumination.  Mon sens de l’observation prit le dessus.

Mon fauteuil avait un dossier haut et sculpté dans du bois de couleur noir. Je devinai sans peine que ce fut de l’ébène. Les pieds du fauteuil étaient semblables à des pieds de félin et sur les accotoirs étaient posés des feuillets d’or. La sculpture du mobilier était d’une extrême finesse : c’était  le travail d’un artiste.  J’étais sur un trône : la gloire avant la chute…

Toutes ces pensées me permirent de m’évader un moment. Mais mes idées lugubres reprirent vite le dessus. Tout d’un coup, j’entendais des coups répétitifs sur le parquet, semblables à une personne qui marchait avec une canne. Mon imagination fertile me fit penser à Joffrey de Peyrrac (1)  . Ma respiration changea.

« Borsalino » m’avait planté là sans dire un mot. Et je ne savais vraiment à quel saint me vouer. Dans l’antre du diable, c’était bien l’occasion d’invoquer les saints.

Devant moi, se trouvait un rideau en tenture vert. Je le sentais bouger. Je le vis alors s’entrouvrir et laisser place à une forme que je distinguais avec peine.

Une voix très ordinaire avec un accent un peu rauque et caverneuse s’adressa à moi :

  • Soyez la bienvenue, très chère ! je vois que vous êtes déjà bien installée. N’ayez crainte aucun mal ne vous sera fait.

Malgré cette entame qui avait l’air assez honnête, j’étais toujours sur mes gardes.

  • Je n’ai pas peur, monsieur.
  • Si vous le dites, je vous crois.

La personne qui s’adressait à moi était toujours dans la pénombre, éblouie que j’étais par l’ampoule au-dessus de ma tête, je ne voyais pratiquement rien.

Je devinais par le bruit sourd que j’entendais que la personne s’était laissée tomber dans un fauteuil.

  • Ainsi vous êtes décidée à me rencontrer et à découvrir mon secret ? Pourriez-vous avoir le courage de soutenir la vue de mon visage ?

Je retins ma respiration, comme avant de plonger dans l’eau.

  • Monsieur, vous pensiez bien que si je n’en avais pas, je ne serais pas venue.

Mon hôte partit d’un rire.

  • J’avoue bien que je l’apprécie, ce courage. De même que l’honneur que vous me faites en me rendant visite. Approchez !

Je quittai mon siège pour m’avancer vers lui. Soudain une autre ampoule s’alluma au-dessus de nos têtes. Je sursautai et faillis prendre mes jambes à mon cou. Mais mue par une force insoupçonnée, je me retins et me figeai sur place : la personne en face de moi portait un masque en inox. C’était cela qui rendait la voix caverneuse !

  • Pourquoi vous faites-vous appeler ‘Le diable’ ?
  • La nuit est longue mais reprenez-donc votre place pour écouter ma part de l’histoire.

Il reprit son souffle et commença :

Il y a une trentaine d’années, je vivais dans l’un des quartiers défavorisés de cette ville. Un des endroits où l’on ne voudrait vivre pour rien au monde.  Pas d’eau, pas d’électricité, livré à soi-même. A cette époque, âgé d’à peine 17 ans et déjà orphelin, je me suis retrouvé à fréquenter un groupe de jeunes voleurs. De fil en aiguille, de vol en étalage aux petits larcins, je gravis peu à peu les échelons pour devenir chef de gang. Mon influence s’étendait au-delà de mon quartier. La vente de drogue aussi fut intégrée à mon petit royaume.

Nous étions traqués par la police qui nous faisait parfois infiltrer par des espions, qui très souvent étaient découverts. Au cours d’une opération d’échange de marchandises avec un de nos partenaires d’affaire, je fus victime d’un guet-apens. Une explosion habilement planifiée eut raison de quelques uns de mes sbires. Moi j’en échappais mais mon visage fut atteint ainsi que ma gorge, et un de mes membres inférieurs, également touché . Après plusieurs opérations, heureusement, j’eus la vie sauve. Mais je fus complètement transformé et mes cordes vocales ont subi aussi quelques changements.

  • Je vous suis attentivement, mais je ne vois toujours pas l’origine de votre pseudonyme.

Il me répondit :

  • Ce nom de ‘Diable’, je ne l’ai eu que depuis une demi-douzaine d’années, suite aux opérations que j’ai subies. Ma voix est un garde-fou et mon masque me permet de préserver le mystère.

Il actionna un loquet au bas du masque et je pouvais enfin découvrir le vrai visage du diable. J’étouffai un cri. Il méritait bien son nom du diable : la personne en face de moi était d’une beauté sans nom.  N’est-il pas dit que le diable ou l’ange de lumière était d’une beauté extrême ?

Je retrouvai vite mon esprit, pour découvrir avec stupeur, que le diable en fait n’en était pas un. Le Diable était une  femme, le diable était plutôt ‘ La Diablesse’ !!!!

(1) Joffrey de Peyrrac : mari de Angélique, Marquise des Anges, héroïne du film du même nom.


Ma rencontre avec le diable (I)

M’entretenir avec le « diable » : cela faisait des mois que je me préparais à ce rendez-vous. En amont, il y a eu ces multiples coups de téléphone. Ce qui a permis de dénicher les meilleurs contacts qui m’ont ensuite fourni les bons indics.

Ce soir donc, je me suis préparée. Des heures durant, j’ai peaufiné mon plan, pour cet ultime entretien de ma vie. Je ne sais pas encore si je reviendrai en entier de ce périple. Mon indic est venu me chercher. Je me suis habillée sobrement, un pantalon de jean noir, des tennis noirs avec un sweat-shirt à capuche marron. Il faut mettre un peu de couleur, tout de même et ne pas penser que j’allais à des funérailles, peut être les miennes : qui sait ? J’ai attaché mes cheveux en catogan, mis ma casquette fétiche en imprimé militaire et enfourché mes lunettes noires. Mais il faut toujours se préparer au pire. Il m’avait prévenue je ne sortirai pas indemne, de cette rencontre.

Mon indic ne communiquait qu’avec des mots, à double sens,  entrecoupés de  gestes très nets.

  • Madame, je vous prierai de laisser votre téléphone portable. Vous n’en aurez certainement pas besoin. Les morts ne téléphonent pas, lâcha-t-il dans un rictus.

Cette phrase cynique me donna des frissons et un long filet de sueur coula dans mon dos. Je déglutis avec peine.

  • Vous avez encore le temps de changer d’avis.
  • Non, lui répondis-je, j’ai commencé et je dois terminer même si c’est au péril de ma vie.

Nous avions d’abord pris sa voiture, après avoir parcouru quelques kilomètres pour sortir de la ville,  il me confia à un autre de ses comparses qui m’embarqua dans une camionnette sans plaque minéralogique.  Celui-ci prit le relais et nous fit traverser des rues à l’aspect lugubre. Et la pleine lune, ajoutait du mystère à cette soirée. Tous les ingrédients étaient mis en place.

Pleine lune
Pleine lune. Crédit photo : pixabay.com

L’homme avait une tête massive, une barbe mal taillée et des yeux révulsés, signes de jours de fatigue. Une vieille borsalino vissée sur la tête. Quelques mèches de cheveux, poivre et sel s’y échappaient. J’estimais son âge dans la cinquantaine. Il portait une chemise carrelée et un vieux jean maculé de tâches. Sa chemise me fit penser à ces cow-boys texans que je voyais souvent dans les documentaires de la chaîne « National Geographic ». Il avait des mains massives comme des hachoirs prêts à débiter de la viande. Ma chair…. Mon sang ne fit qu’un tour : dans quel guêpier me suis-je encore jetée ? Mais ma soif du sensationnel dominait toute réflexion sensée, comme de l’huile sur de l’eau.  J’étais à la fois animée par la peur et le désir d’assouvir cette curiosité morbide.

Après plus d’une heure de route, nous débarquâmes, dans une usine désaffectée, à peine éclairée. D’après l’odeur d’huile à moteur qui s’en dégageait et les ombres des pneus que ma pupille, peu à peu habituée, au noir commençait à distinguer, j’en conclus que cela devait avoir un lien avec un garage de voitures ou je ne-sais-quoi.

Il arrêta le moteur et se tourna vers moi. Il avait un foulard en soie dans les mains.

  • Tournez-vous, me jeta-t-il à la figure.

Les tout premiers mots qui sortirent de sa bouche depuis mon entrée dans la camionnette. Je m’exécutai sans broncher. Il me banda les yeux.

Maintenant, je ne pouvais compter que sur mon seul sens auditif. Je l’entendis descendre puis venir m’ouvrir la portière. Il  prit ma main. Je pensais bien que c’était le début de  ma descente aux enfers.

La main qui me saisit était calleuse. Avec une forte poigne, il me tira derrière lui comme un ballot mal ficelé. Je risquais de tomber à chaque pas. Mes pieds se prenaient tantôt dans des sacs de plastique, tantôt dans des fils de fer.  Je devinais le bas de mon jeans parsemé  de coupures, je sentais de fines déchirures sur mes jambes. Cette marche dans le labyrinthe de Thésée, dura une période que je n’avais aucun moyen d’estimer.

Nous nous arrêtâmes  soudain, puis mon bandeau me fut arraché des yeux. Je me retrouvais devant une large porte en fer. Mon ‘’compagnon’’ appuya sur un bouton noir situé à gauche de la porte dans une encoignure. Cela enclencha un système qui me fit découvrir un petit panneau latéral qui s’ouvrit pour laisser place à une tablette. Je le vis composer un code.

La porte coulissa dans un grincement de gong. Il me poussa à l’intérieur.

 


Portrait – Salifou, le conducteur de tricycle

Aujourd’hui, nous partons à la découverte du métier de conducteur de tricycle. Connaissez-vous le tricycle ?

C’est un véhicule motorisé qui sert à transporter soit de la marchandise soit des êtres humains. L’usage est plus conseillé en campagne, mais depuis quelques années, la présence de ce véhicule un peu particulier est devenue une réalité à Lomé et ses environs.

Salifou, à bord de son tricycle. Crédit photo : Benedicta

Zémidjan un jour, mais pas pour toujours

L’histoire de Salifou, d’origine nigérienne, a débuté il y a 18 ans, lorsqu’il est arrivé à Lomé. « J’ai d’abord commencé comme zémidjan (conducteur de taxi-moto) . Un métier pas du tout facile, comme vous le savez. » Il ajoute que ce métier apporte la pitance quotidienne mais est éreintant lorsque l’on ne jouit pas d’une santé solide.

Ce n’est qu’en 2017 qu’il a arrêté cette profession par la force des choses. Depuis, Salifou est conducteur de taxi-tricycle.

La journée du conducteur de Keke Napep [1]

Le tricycle, d’origine asiatique, est apparu au début des années 2000 en Afrique de l’ouest, précisément au Nigeria où il est appelé Keke Napep. Ils sont importés ou montés sur place. Au Togo, ils ont moins d’une décennie et sont visibles seulement sur quelques trajets.

Salifou, notre conducteur, la quarantaine, est une personne affable, au regard plein d’espoir. En effet, il me raconte que ce tricycle ne lui appartient pas, ce qui est assez fréquent. « J’ai un patron, à qui je fais des comptes quotidiens, mais j’arrive quand même à tirer mon épingle du jeu. »

Vous pouvez emprunter le taxi de Salifou s’il vous arrive de faire des courses sur le tronçon routier reliant la zone portuaire de Lomé au quartier Agoè Zongo (au nord de Lomé).

Le tarif d’une course se négocie entre 200 et 400 FCFA [2]. Sa recette journalière tourne autour de 10 – 15 mille francs CFA, un peu moins de la moitié est consacrée au carburant. Après y avoir soustrait le loyer quotidien du propriétaire du véhicule, le reste est pour Salifou. Père de famille, avec une épouse et une fille, il doit subvenir aux besoins des siens.

Conduire en toute sérénité

Il arbore un éternel sourire et me dit avec un air satisfait que son véhicule est assuré. Cela est nécessaire mais n’est pas probant pour la grande partie des tricycles. Une assurance-véhicule est sûrement un visa de protection pour les passagers mais aussi contre le harcèlement des policiers.

Ce véhicule peut prendre jusqu’à 6 personnes, le conducteur y compris. Les passagers ne bénéficient d’aucun appui physique, à part une sangle située de part et d’autre du taxi. Il faut la saisir avec la force du poignet. Le passager du milieu est calé par les autres clients. A l’intérieur, ce petit monde est exposé aux effluves et aux senteurs qu’on peut humer, tout le long du parcours. Mais parfois on y jouit d’une réelle brise, ce qui vous donne envie de dormir et de profiter de la vie. D’où l’autre nom de ce moyen de transport inhabituel : Ogborodjayé [3]

Devenir propriétaire : un rêve ?

Ce métier donne à Salifou l’opportunité de faire des économies. Il rêve lui aussi, de pouvoir acquérir un jour, un keke napep, grâce à un programme de subventions que l’Etat togolais a récemment lancé. Mais en attendant, la réalisation de tous ces rêves, Salifou continue ses courses dans son tricycle.

 

 

[1] Keke : mot d’origine yorouba, ethnie du sud Bénin et Nigéria, pour désigner tout véhicule motorisé à deux roues, vélo ou moto / Napep : est le nom d’un programme (National Poverty Eradication Programm), initié en 2002 par le président Olusegun Obasanjo pour endiguer la pauvreté au Nigeria.

[2] 1 Euro = 655,95 XOF (F CFA)

[3] Ogborodjayé : mot d’origine yorouba, ethnie du sud Bénin et Nigéria, Ogboro=pauvre ; djê=manger (sens littéral) ; ayé = la vie : le pauvre qui goûte à la belle vie

 


Je garde donc je suis

Ce week-end, profitant d’un peu d’accalmie dans mon planning, j’ai décidé de faire un peu de ménage dans mon environnement.

Chaque trimestre au moins, je mène cette opération. Je trie tout et je passe partout : cuisine, toilettes, chambres à coucher, vêtements et chaussures, vieux magazines, jouets des enfants, etc…

Mais ce coup-ci, c’est seulement ma chambre que je veux ranger. Je m’attaque en premier à ma garde-robe, je commence par trier les vêtements que je ne porte plus très souvent. C’est durant cette opération qu’il m’est venu l’idée d’écrire un billet sur le sujet, je dirai plutôt le sujet contraire : les personnes qui ne jettent jamais rien.

En faisant des recherches, je découvre que c’est une réelle pathologie : la syllogomanie ou le syndrome de Diogène.

Lieu de vie encombré. Crédit photo : www.syndrome-diogene.fr

Je me souviens, il y a quelques années, avoir regardé un documentaire sur cette tendance à vouloir tout garder et ne rien jeter. J’en riais presque. On en parlait plus comme d’un TOC (Trouble obsessionnel convulsif ) que d’une maladie.

Je constate avec effarement que le problème a évolué en flèche.

Dans nos sociétés très consommatrices, il est facile de devenir ‘accro’. Tout vous incite à acquérir et consommer toujours et encore plus : les publicités à outrance, dans vos mails, à vos portes, sur votre téléphone, partout ! Une vraie « boulimie de possession » : on n’a pas fini d’utiliser les derniers vêtements à la mode qu’une nouvelle tendance apparaît. Et voilà que l’on court l’acheter pour ne pas être en marge.

Au fil des années, on se retrouve avec une montagne d’objets « obsolètes », difficiles à jeter. On les garde alors dans un coin de la maison avec un certain espoir de pouvoir les utiliser un jour. On voue à ces objets un sentiment très fort. Presque comme de l’amour, mais dans une relation de personne à objet.

Mais, mais, mais, (trois fois mais !) comme dans une relation dangereuse, il est nécessaire de faire la sélection dans sa vie comme dans son habitat. Garder les objets qu’on n’utilise pas ou qu’on n’est pas prêt d’utiliser, c’est être matérialiste. Cela vous tire en arrière, vous n’évoluez pas. Il vous est difficile d’avancer, vous restez scotché sur place.

Un seul conseil : débarrassez-vous de tout ce fatras d’objets !  Triez vos habits et offrez-les autour de vous ! Les vieux journaux jetez-les ou donnez-les à des centres de lectures de votre quartier ou aux prisonniers, ça leur fera du divertissement ! Les vieux jouets de vos enfants, offrez les à des centres de loisirs, organisez un vide-grenier, recyclez, recyclez !!!

Après cette grande opération, vous vous sentirez léger. Un bon conseil que je vous donne : faire le tri dans sa maison, c’est comme faire le tri dans ses relations. On se débarrasse des personnes toxiques et de toutes les mauvaises énergies qui les accompagnent. En tout cas, essayez et vous verrez !

Bon ménage à vous !!