Benedicta honyiglo

Mystère sur mes origines

Je me réveille encore, tout en sueur, avec ce rêve constant qui tourmente mes nuits : une belle jeune à la forme diaphane s’avance vers moi. Puis, au moment où je crois reconnaître son visage, une grosse main surgit de nulle part et me saisit le cou. A ce moment précis, je me réveille en sursautant. Cela fait déjà douze bons mois que je suis en quête de la vérité. Je jette un coup d’œil à mon réveil de chevet : il est 2 h 10.

Fils unique, dès mon adolescence, j’ai su que je n’avais aucun lien biologique avec M. et Mme Dansou, mes parents. Physiquement, nos ressemblances étaient plus que discutables. Ce n’était ni mes cheveux trop raides et encore moins mon teint trop clair qui le démentiraient. Quant à la taille, mon père était bien plus proche d’un Omar Bongo que mon 1m90 ne me rapprochaient d’un Abdou Diouf. Malgré ces différences physiques notables, ils n’ont pas dérogé à leur rôle de parents aimants et protecteurs.

Je sors de mon lit pour aller prendre un verre d’eau. En ce moment précis, c’est tout ce qui peut me calmer.

En prenant le long couloir principal qui conduit vers la cuisine, située à l’autre bout de la maison, je sens ce produit d’entretien. La même que dans mon rêve. Ayant pénétré mon cerveau, elle s’est ensuite invitée dans mes rêves. Cette fragrance persiste dans la maison après le passage de Davi, notre employée de maison, depuis quinze ans.

Crédit photo : Pixabay

Davi, pour moi, était une seconde maman. Elle prenait si bien soin de moi et j’aimais particulièrement sa cuisine, surtout ses gâteaux qu’elle me faisait manger à chaque petit-déjeuner. Elle n’habite pas loin de chez nous. Elle a perdu son mari voici une vingtaine d’années et n’a plus voulu se remarier. Davi s’est alors consacrée corps et âme au couple Dansou et à leur fils, c’est-à-dire moi. Elle aimait dire que nous étions sa deuxième famille.

Les carreaux sont froids sous mes pieds, j’ai encore oublié de mettre mes claquettes. Juste boire et retourner dans mon lit, en espérant pouvoir me rendormir. Un trait de lumière filtre sous la porte du bureau de Papa. Davi a certainement oublié d’éteindre.

Hier après-midi, c’était la fête. Le 30e anniversaire de mariage de mes parents. Les amis, la famille et les collègues, tous étaient présents. Enfin, mes parents avaient leur lune de miel. D’après ce que Papa m’a dit, un ami de longue date qu’il avait tiré d’une mauvaise passe leur a offert le périple de leur rêve. Une lune de miel, qu’ils n’avaient pu s’offrir, à l’époque. Un voyage de deux semaines sur les îles Hawaï. Beau et adorable ! Cela m’intrigua, c’était une petite fortune, ce voyage de noces. J’espère que Papa me donnera plus de détails à leur retour, j’étais curieux de savoir qui était ce mécène.

Après les festivités, je les ai accompagnés à l’aéroport. Cela m’a fatigué. En outre, je dois me souvenir de ranger les derniers dossiers que mon père m’a confiés : faire le tri, vérifier et ranger tout cela avant leur retour. Comme mon père, je suis comptable.

Poursuivre aussi mes recherches sur mon adoption. Je sais qu’elle est plénière[1], c’est tout. Les quelques indices fournis par mes parents ne m’ont guère avancé. Sans plus d’informations sur la vérité de ma naissance, je me sens paumé. Je nage dans le vide, dans l’obscurité, un néant insoluble, mais je n’y renonce pas.

J’imagine les remarques de ma mère, si elle avait vu cette ampoule non éteinte dans le bureau de papa. Maman est très méticuleuse sur les questions d’écologie et économie d’énergie. Papa lui, reflète plutôt la rigueur et la discipline. Chez lui, je soupçonne une déformation professionnelle.

J’ouvre la porte et me rappelle qu’il représente toute l’autorité de mon père : M. Dansou. Une porte en bois peinte en noire, avec une poignée ronde. Je n’y entrais qu’à très peu d’occasions : la veille des rentrées scolaires et universitaires pour recevoir les conseils de papa par exemple. Ou le jour où nous avons discuté des recherches sur mon adoption.

J’ai d’abord fait le tour de toutes les agences d’adoption de ma ville : je me suis retrouvé face à l’absence d’organisation de nos services administratifs. Pas d’archives en tant que telles. Ils sont toujours restés à l’époque de Mathusalem. Aucun système informatisé pour garder toute cette documentation. Déçu, je l’étais, bien évidemment.

J’ai même fait appel à une agence de détective. Un ancien policier qui s’est mis à son compte. Un visage, aux yeux chafouins, un nez retroussé et un menton fuyant, c’était Monsieur Georges. Son chapeau feutre, toujours fixé sur la tête et sa cigarette au coin de la bouche, on le croirait sorti tout droit d’un film des années 1950. Il me faisait surtout penser au lieutenant Columbo. Sous ce feutre se cachait des cheveux courts poivre et sel. Il ne manquait que le trench-coat kaki pour que le profil soit complet. Crédule, j’ai cru qu’il était l’homme à la hauteur de l’énigme (sur mes origines ?). Il pouvait tout résoudre, ressassait-il à nos nombreux rendez-vous. 

Très vite, il s’est révélé être un imposteur. J’ai dû aller porter plainte contre lui. Malheureusement, il a disparu des radars. Ce fut la deuxième déception.

Puis ce fut le tour des mairies et des états-civils. Puis des cliniques, dans un cercle circonscrit à mon lieu de naissance. J’ai interrogé des sages-femmes, des infirmières. J’ai été confronté à une pléiade d’êtres humains, tous plus fourbes les uns que les autres. Des employés pas toujours conscients de ce qu’on attendait d’eux. Et toujours glisser des pourboires à n’en point finir. Pour finalement aboutir à pas grand-chose.

Il y a eu également cette dame qui s’était fait passer pour ma mère biologique. Je ne sais pas comment elle s’y était prise pour fabriquer des documents, semblant tellement plus vrais que nature. L’espace d’un instant, j’y ai cru. C’est au moment d’entamer la vérification par les tests ADN que la bonne dame a fui. J’ai pensé à un réseau de faussaires en documents administratifs, avec la complicité des employés de la mairie. Ils voulaient uniquement profiter  de moi. Je tombais de Charybde en Scylla. Mes émotions étaient en montagnes russes. Je n’ai plus eu le courage de porter plainte. Ça me faisait finalement trop d’émotions à gérer.

Crédit photo : Pixabay

Sur le bureau, je remarque un tas de documents dans des chemises et des enveloppes en papier kraft : mes dossiers. En voulant les ranger, je fais tomber une liasse par terre. Je contourne alors le bureau et me baisse pour les ramasser. Mon regard est attiré par une corde avec un anneau qui pendouille du côté interne du meuble. Ma curiosité supplante ma soif.

Je tire sur la corde. Elle se casse net. En me baissant, je remarque une petite encoche au-dessus du petit trou d’où sort la cordelette. Je retourne sur mes pas pour chercher un outil qui pourrait m’aider à ouvrir cette cavité surprise.

Je vais à la cuisine pour chercher un couteau. J’étancherai ma soif plus tard.

J’agrandis l’ouverture au-dessous du trou àl’aide d’un couteau, pour y glisser un ou peut-être deux doigts. Cette image me fait sourire.

Je pense à Evelyne, ma copine. Non, mon ex-copine. Elle aimait bien ce jeu de mots. « Glisse ton doigt ! Glisse ton doigt ! » Je ne sais pas pourquoi je pense à elle, en ce moment. Cela fait déjà quelques mois que nous ne sommes plus ensemble. Mon obsession pour connaître mes origines m’a fait changer de priorités. Notre relation en a pris un coup.

Je me rappelle notre première rencontre. Evelyne semblait perdue dans ses pensées ce jour-là, devant l’arrêt de bus. Elle n’a pas du tout fait attention en traversant et j’ai failli la renverser. Je suis un adepte de la vitesse et ma moto Trail Kawasaki était bien à mon image. Au dernier moment, où j’ai failli la heurter, elle a fait un mouvement brusque qui l’a projetée en arrière, puis elle est tombée par terre. Plus de peur que de mal. Je l’ai alors ramené chez elle. Puis je suis revenu tous les jours suivants, pour avoir de ses nouvelles. Ce fut le début de notre histoire.

Qu’est-ce qui m’avait attiré chez elle ? Je ne sais pas, peut-être ce parfum de miel vanille émanant de ses cheveux. Cela m’a fait penser aux délicieux gâteaux de Davi. Ma madeleine de Proust en plus vivant. J’ai senti ce doux parfum quand je me suis penché sur elle pour la relever, le jour de l’accident.

C’était une jeune fille à l’air romantique mais qui était un vrai volcan au lit. Pour elle, le sexe avait une place essentielle dans notre relation. Je pense à ses courbes généreuses qui étaient toujours une invitation tentante, prélude à nos ébats effrenés. Sa langue chaleureuse connaissait chaque morceau de ma peau. Sa poitrine était la source d’eau fraîche qui apaisait mes pensées au retour de mes longues journées de recherche sur mes origines. Je ne résistais jamais bien longtemps à la chaleur de son corps. Nos deux chairs se connaissaient tellement, nous n’avions pas besoin de beaucoup de mots. Ces moments de douce félicité étaient le prélude à l’explosion d’une infinité d’énergies enfouies dans nos corps en chaleur. Une mélodie sans cesse répétée.

Notre rupture s’est faite sans bruit. Mais moi, cela m’a quand même affecté. D’où mon retour chez mes parents. Nous avions emménagé ensemble. Au retour d’une de mes quêtes, j’ai trouvé une lettre sur mon lit :

« Dodzi, malgré ma grande passion pour toi.

Je ne puis rivaliser avec cette quête.

Elle plane sur nous, lugubre.

Tes origines me font de l’ombre

À chaque départ, je me sens fébrile

À t’attendre, haletante, pour espérer toujours et toujours, une bonne nouvelle

Qui tarde de plus en plus à venir.

Je te libère de mon emprise.

Tu sais que mon cœur est tien, mais mon corps

Incapable de supporter tes absences.

Ne pense plus à nous, pense à toi. »

Evelyne

Malgré la peine que je pouvais imaginer être la sienne, son romantisme gardait de toute sa superbe, cette lettre d’adieu tout en poésie. C’était bien elle. Evelyne…

J’enfonce le couteau avec rage dans ce bois rugueux. Je penserai à la manière de boucher ce trou plus tard. J’ai accès à un espace sous le bureau, je plonge ma main droite. Je sors un rouleau de papiers jaunis, ficelé avec une corde en chanvre. Une odeur âcre de vieux papiers m’accueille. Une fine couche de poussière recouvre mes doigts.

Je romps la corde déjà en piteux état. Le titre plaqué en grands caractères sur la première page m’intrigue.

C’est un document final sur des recherches scientifiques dans une université européenne. J’ai de nouveau soif. Je tire la chaise en bois et m’assois pour lire.

Au bout d’une heure de lecture, je suis surpris puis effondré : toute ma vie n’est qu’un tissu de mensonges. Je suis enragé. J’ai envie de tout casser. Je vais appeler mon père. Je me rappelle qu’à cette heure, ils devraient être quelque part dans un aéroport ou dans les airs. Mon cœur bat si fort. J’étouffe, je retourne à la cuisine. Je dois boire.

Aurais-je le courage et la patience d’attendre leur coup de fil ? Je passe par toutes sortes de sentiments. Ce document, c’est ma vie entière. Les mots résonnent dans ma tête : test, laboratoire, embryon, cellule, ADN… Et ce contrat, avec ce montant faramineux.

Il est écrit que la somme d’argent peut être touché à partir de la vingt huitième année d’existence, si le prototype n’a subi aucun dommage physique et ne montre aucune atteinte psychologique grave. Et pour que les conditions soient totalement remplies, on y sous-entend pour finir que l’autre partie ne doit pas faire défection avant ladite échéance. Je fais tout de suite le rapprochement avec la petite fortune. Celle qui finance en ce moment l’escapade fastueuse du couple.

Je saisis un verre dans l’armoire au-dessus de l’évier, j’ouvre le robinet. Perdu dans mes pensées, je ne vois pas l’eau déborder du verre et couler sur mes doigts. Malgré la fraîcheur de la nuit, de la sueur perle sur mon front. Mes doigts tremblent. J’ai la gorge douloureusement nouée et ma bouche est amèrement sèche. Toute ma bouche est sèche. J’y porte le verre, d’un geste mécanique. L’eau fraîche descend dans ma gorge. Non ! Un sentiment d’amertume remplit tout mon être. Je vois ma vie se dérouler en kaléidoscope.

Toute cette absence d’informations sur ma naissance s’explique soudainement. Je n’ai pas un parent, je n’en ai pas deux, j’en ai plusieurs. Non, en fait, je n’en ai tout simplement pas. Point !

Crédit photo : Pixabay

Je suis le produit d’une manipulation génétique effarante. Cela dépasse tout entendement : je suis le fruit d’une étrange incantation de formules scientifiques, de plusieurs combinaisons d’ADN. Je ne suis donc que le fruit de plusieurs années de recherche ? Ne suis-je que ça ? De rage, je lance le verre  contre le mur de la cuisine. Comme ma famille, il vole en éclats ! Je suis un prototype créé, oui, créé depuis 28 années : je suis un clone ou un clown, peut-être.

Un rire brusque me saisit : la vérité, est que j’ignore ce que je suis.


[1]
                  [1] Adoption plénière : En France, l’adoption plénière est une forme d’adoption qui, à l’opposé de l’adoption simple, rompt tout lien de filiation et tout contact entre l’enfant et ses parents de naissance. Elle est irrévocable, soumise à conditions, et doit faire l’objet d’un jugement. Une fois celui-ci prononcé, l’enfant dispose d’un nouvel état civil


Le dernier blues de Chadwick Boseman

Il y a quelques jours, Netflix nous a offert la dernière et non des moindres de ce qui restera dans l’histoire comme l’ultime prestation de cet acteur talentueux que fut Chadwick Boseman.

Le Blues de Ma Rainey est depuis ce vendredi 18 décembre sur la liste des films de Netflix. S’il faut le qualifier, un seul mot ne suffirait pas : intense, captivant, émouvant… Ce long-métrage réalisé par George C. Wolfe, est une adaptation d’une pièce de théâtre d’August Wilson, lauréat à deux reprises du prix Pulitzer.

J’ai arrêté depuis quelques années de regarder les films qui réveillent la douleur et le racisme envers les noirs, car en plus d’en entendre parler chaque jour partout, je ne vais pas en plus le subir en le vivant par personnes interposées à travers des films. Cela a toujours été trop intense pour moi : palpitations, souffle coupée et des pleurs trop souvent.

Nous sommes dans un studio d’enregistrement à Chicago, dans les années 1920. Quatre musiciens s’entraînent pour leur session d’enregistrement, en attendant l’arrivée de Ma Rainey, la mère du blues.

L’ultime prestation

Parmi eux, Levee, jeune trompettiste talentueux. Il a subi un grand traumatisme dans son enfance, qui le rend irascible et imprévisible. Mais il a la tête pleine de rêves sur son avenir artistique. Un rôle que campe à merveille Chadwick Boseman.

Puis arrive sur scène Ma Rainey, chanteuse de blues, flamboyante, égocentrique à souhait, capricieuse, qui n’a pas peur d’imposer sa volonté. Et elle ne se laisse pas marcher sur les pieds dans cette Amérique blanche, raciste, intéressée, qui fait deux poids, deux mesures dans le monde artistique des années 1920.

On y voit la magnifique Viola Davis, plusieurs fois primée dans le cinéma américain, qui campe un rôle qui a l’air écrit sur mesure pour elle. Avec son visage outrancièrement fardée et constamment en sueur, difficile d’échapper à la chaleur intense qui règne dans le film. J’avoue que cette sueur sur son visage m’a dérangée tout le long du film, j’aurai voulu rentrer dans l’écran pour aller la lui essuyer…

S’il faut retenir une seule chose, c’est que Chadwick aura joué intensément et avec toute sa dernière énergie son rôle dans ce film. Un film qui clôt la longue liste de sa vie cinématographique.

Un rappel de l’actualité

Ce film nous  ramène également à l’actualité constamment présente dans nos têtes : celle de la mort de George Floyd et du mouvement Black Lives Matter. Les Etats-Unis, qualifié de pays démocratique, n’a toujours pas fini de se battre avec son vieux démon qu’est le racisme.

Un seul conseil : courez vite voir ce film, plein de tensions jusqu’à la dernière minute. Certainement la meilleure sortie de cette fin d’année, année 2020, tout à fait particulière.

PS : Si vous avez le temps, regardez aussi le documentaire réalisé sur les coulisses du tournage, disponible sur Netflix.


L’Organisation des Nations Unies, les objectifs de développement durable et le monde de demain

L’Organisation des Nations Unies. Vous connaissez ? Je n’en doute point. Cette organisation célèbre justement ses 75 ans d’existence, en cette année 2020.  Le monde est en pleine crise sanitaire : la crise du coronavirus. 

Cette maladie décrétée pandémie, met à nu et agrandit toutes les disparités auxquelles les humains ont toujours fait face. Depuis 2015, les Nations Unies ont adopté un agenda pour 2030, qui vise à diminuer voire éradiquer ces différences tant sociales, sanitaires qu’économiques qui existent entre les humains, assainir l’environnement, protéger les ressources naturelles, promouvoir la paix et l’équité entre les genres, etc. Ces objectifs à atteindre sont rassemblés sous le vocable des « 17 Objectifs de développement durable » (ODD)

Cette célébration donne aussi l’opportunité aux Nations-Unies d’initier un dialogue global entre et pour les pays. L’occasion d’entendre un maximum de voix pour soulever les craintes,  les espoirs et essayer de trouver des solutions pour le monde de demain que nous voulons meilleur que celui d’aujourd’hui.

Pour cette occasion, le système des Nations Unies, au Togo a initié une rencontre avec les médias, le 27 juillet 2020 à Lomé.  L’assistance était évidemment composée des professionnels de media, des patrons de presses, des membres des associations de presse et des responsables des agences du système des Nations Unies : OMS, FNUAP, ONUSIDA, PNUD… Moi, j’y ai participé en tant que blogueuse.

Je vous livre ici une réflexion personnelle, qui n’est qu’une partie du débat sur les thèmes soulevés. Tant les domaines sont vastes et s’imbriquent les uns dans les autres. Nous espérons que le débat se poursuivra avec de nouvelles rencontres pour pousser encore plus loin nos réflexions sur ces sujets qui ne cessent de susciter tant d’inquiétudes et d’espoir. Bonne lecture !

 

Quels sont les grands domaines qui peuvent contribuer au progrès vers l’avenir que nous voulons ? 

Pour moi, les domaines essentiels qui peuvent participer au progrès de l’avenir pour le monde de demain sont la réduction de la pauvreté (ODD1), l’accès aux soins de santé (ODD3) et à l’éducation  pour tous (ODD4) avec un accent particulier sur  les nouvelles technologies, la protection et la gestion des ressources naturelles (ODD 14 et 15).

De nos jours, l’on parle des diverses politiques de développement. Toutes ont certes une vision humaniste. Pour moi, un développement qui n’a pas comme centre d’intérêt le bonheur de l’homme c’est-à-dire son bien-être, n’a pas sa raison d’être.

La crise de la Covid a montré la fragilité et les limites de notre société, tant sur le plan sanitaire, éducationnel que technologique… bref dans beaucoup de domaines jugés jusque-là essentiels à l’épanouissement de l’Humain.

En considérant le domaine de la santé et de l’éducation, la pandémie du coronavirus a accentué une fracture sociale déjà existante et plus ou moins tue.

Dans le domaine sanitaire, les couches dites vulnérables n’ont pas eu accès aux bonnes informations quant aux précautions à prendre pour faire face à la crise. Et même quand elles y ont eu accès, avaient-elles les moyens matériels et financiers pour se l’approprier ? Combien avaient eu la chance de trouver de l’eau potable et du savon pour appliquer les gestes barrières ? Ce qui rejoint l’ODD 1 qui vise la réduction de la pauvreté et l’ODD6 pour rendre accessible à tous l’eau propre et un système d’assainissement amélioré.

En abordant le domaine de l’éducation lorsqu’il a fallu trouver des solutions pour permettre aux apprenants de continuer les cours, tout le monde n’était pas logé à la même enseigne. Certains par manque d’énergie pour permettre l’accès aux outils technologiques,  d’autres par manque de personnel enseignant ou par manque de matériels, n’ont jamais vu la couleur de ces cours en ligne. L’information n’a pu atteindre les personnes démunies. Et si elle les atteint, les moyens financiers pour l’avoir faisaient défaut.

Tant dans les pays en développement que les pays dits développés personne n’a eu « la science infuse ». Au Togo, après quelques tâtonnements, petit à petit des solutions adaptées à notre population ont été trouvées.

Je pense que nous devons sérieusement repenser nos systèmes de développement sur le plan sanitaire, éducationnel, environnemental pour rendre nos populations aguerries et au fait des changements mondiaux qui surviennent.

Les 17 Objectifs de développement durable Source : www.un.org

Pour le monde de demain, plusieurs questions fondamentales dont la pauvreté et les inégalités, les nouvelles technologies, les changements démographiques, la paix et la sécurité, les changements climatiques, suscitent beaucoup de réflexions… Lesquelles de ces questions ou toute autre encore vous semblent primordiales pour le monde de demain ?

Toutes ces questions sont essentielles et leurs solutions intimement liées. Le monde de demain à mon avis doit tenir compte :

– de la réduction des inégalités (ODD10) par la mise en place de mécanismes de réduction de la pauvreté. L’établissement de programmes ambitieux avec un accès facile par les couches défavorisées aux microcrédits sont à encourager.

– de la promotion de l’égalité entre les sexes (ODD5) qui ne devrait pas être négligée dans cette quête de la réduction des inégalités sinon les mêmes causes risqueraient de produire les mêmes effets. Cette option est à inclure dans tout programme et/ou projet.

– pour un développement harmonieux la prise en compte du climat et de l’environnement (ODD 13, 14 et 15) est aussi importante. Nous vivons dans un monde entouré par un écosystème avec lequel nous avons des relations d’interdépendance.

Comment l’ONU peut-elle mieux contribuer à la construction du monde de demain ? Quels devraient être les domaines prioritaires pour l’ONU et les institutions internationales et régionales ?

L’ONU doit concentrer ses efforts sur la réduction des inégalités pour rendre accessible à tous l’accès aux soins pour une meilleure santé et l’éducation pour tous, surtout l’éducation des jeunes filles. Une meilleure éducation entraîne l’accès à de meilleurs emplois, tout en prônant l’égalité des genres pour permettre à la femme d’être rémunérée à un poste égal, au même taux qu’un homme. Cela aura l’avantage de réduire la pauvreté et les fractures sociales.

Pour les institutions tant internationales que régionales, un accent particulier doit être mis sur la promotion des énergies renouvelables (ODD 7) pour permettre la croissance économique (ODD 8) et industrielle (ODD 9) de nos pays qui ont déjà beaucoup d’atouts naturels mais qui ne sont malheureusement pas exploités. Les états devront s’atteler à financer les entreprises œuvrant dans ce domaine en leur facilitant l’accès à ces sources de financement.

L’ONU doit continuer par avoir son rôle de gardien de la paix et aider au progrès social de notre société, en faisant la promotion d’un climat de paix, de justice grâce à des institutions fortes (ODD 16). Pour cela, elle a besoin du soutien de nos états, pour un partenariat efficace afin d’atteindre les objectifs fixés (ODD 17).

Voici pour moi, le monde de demain que j’imagine, meilleur que celui d’aujourd’hui pour permettre l’épanouissement de tous.

Pour continuer la conversation, voici un lien qui vous permet de réagir, d’élargir le débat et de faire entendre votre voix.


Ma cuisine confinée

Depuis le début de cette pandémie du coronavirus, beaucoup de nos habitudes ont changé. On se consacre un peu plus à certains loisirs pour lesquels on n’avait pas beaucoup de temps. Mon autre passion après la lecture et l’écriture, c’est la cuisine. Je partage ici avec vous quelques unes de mes recettes préférées.

Atchonmon[1] étoilé

  • 2 verres de farine
  • ½ cuillerée à soupe de levure chimique
  • 2 cuillerées à soupe d’huile
  • ¼  cuillerée à café de sel
  • 1 cuillerée à soupe et demie de sucre
  • 0,20 litre d’eau
  • Quelques pincées de noix de muscade/quelques grains d’anis
Atchonmon étoilé. Crédit photo : Bénédicta H.

Mélanger tous les ingrédients pour obtenir une pâte plus ou moins ferme. Laisser reposer 30 minutes. Etaler ensuite sur le plan de travail et découper selon la forme voulue, ici des étoiles. Frire à feu doux. Retirer de l’huile dès que cela commence à dorer. Déposer sur du papier absorbant. Et voilà !! Bonne dégustation.

Cette recette enchante les enfants pour un petit goûter accompagné de jus de bissap bien frais.

Poudre de suya

  • Quelques baguettes (une vingtaine) de kuklui[2] ou des boulettes (une cinquantaine) de gonazo[3] ou de l’arachide grillée
  • Un mélange ou un assortiment d’épices en poudre (ail, gingembre, oignon, anis, piment, coriandre, persil, cannelle, noix de muscade,…)
  • Un cube de bouillon dans ce cas, ne plus mettre de sel dans la préparation.

Mélanger le tout et passer au mixeur sec. Garder la préparation dans un bocal bien au sec. Il est à préciser que la quantité de kuklui ou de gonazo est définie selon votre désir et vos besoins.

Poudre de suya. Crédit photo : Bénédicta H.

Cette poudre peut être utilisée comme une mixture à laquelle il faut  ajouter de l’huile et de la tomate concentrée pour les grillades de poulet ou de bœuf. Vous pouvez aussi déguster le suya avec du pain (baguette ou pain sucré) tout simplement. Le suya est un mot d’origine haoussa, qui signifie « griller » ou « frire ». Les Haoussas sont une ethnie habitant des régions du Bénin, du Nigeria, du Niger et du Burkina Faso, en Afrique de l’Ouest. On en trouve également au Togo.

Botocoin[4]

  • 300 g de farine de blé
  • 100 g de sucre en poudre
  • 1 pincée de sel
  • 1 sachet de levure boulangère
  • 300 ml d’eau tiède
  • Quelques pincées de noix de muscade rapée
  • De l’huile pour la friture

Verser la farine dans un saladier ou un grand bol. Dans un autre saladier, verser l’eau tiède, le sucre, le sel, la levure boulangère et la noix de muscade. Bien mélanger et verser cette préparation sur la farine. Mélanger à la main ou à la spatule pour obtenir une pâte homogène c’est-à-dire sans grumeaux et onctueuse. Couvrir ensuite et laisser reposer durant 2 à 3 heures. Mettre de l’huile à chauffer. Former des boules puis les  mettre à frire. Retourner de temps à temps pour éviter que cela ne brûle. Retirer de l’huile dès que c’est doré. Laisser reposer sur du papier absorbant.

Botocoin. Crédit photo : Bénédicta H.

A déguster avec de la bouillie de mil ou de maïs (akluizogbon[5], akassan[6] ), en petit déjeuner ou en goûter.

Gâteau au yaourt

  • ½ paquet de levure chimique
  • 1 pot de yaourt nature
  • ½ pot d’huile (arachide, tournesol,…selon votre goût)
  • 2 pots de sucre en poudre
  • 3 pots de farine
  • 2 œufs
  • 1 cuillerée à soupe de rhum ou de sodabi (alcool local)
  • Quelques gouttes d’arôme vanille

Préchauffer le four à 180°C ou Thermostat 06.  Mélanger les ingrédients en suivant l’ordre (levure, yaourt, huile, …). Beurrer un moule ou mettre du papier sulfurisé dans le moule, y verser la pâte. Enfourner pour 30 mn. Le gâteau est prêt lorsqu’une lame de couteau introduite, y ressort sèche.

Gâteau au yaourt. Crédit photo : Bénédicta H.

Bon appétit et à la prochaine !


[1] Atchonmon : snacks de farine de blé cuits dans l’huile ou au four

[2], [3] Kuklui et gonazo : snacks fait à base de pâte d’arachide Les deux ont le même goût seule la différence de forme a donné cette diversité de nom

[4] Botocoin : beignet sucré de farine de blé

[5], [6] Akluizogbon et akassan : type de bouillie de maïs


Le laxisme et le népotisme règnent toujours en maître dans nos administrations

Il y a quelques mois, je voulais renouveler les cartes d’identité de mes enfants, ce fut pour moi un parcours de combattant.

Au Palais de Justice

Cela a débuté par le service de l’établissement du certificat de nationalité. Je devais me faire établir des duplicatas de ces pièces. Deux mois plus tôt, j’en avais demandé pour des parents. Et j’ai pu en prendre autant que j’en voulais.

Mais le jour-là, je pense qu’une nouvelle consigne a été appliquée : les citoyens ne pouvaient prendre qu’une seule copie et par jour. Le processus consiste à s’inscrire sur une liste de 10 personnes et à payer 1 000 francs CFA*( 1) par copie demandée. Certaines personnes ont essayé de passer outre la consigne. Leur deuxième demande a été purement et simplement rejetée. Et lorsque nous voulions savoir les raisons, nous avons buté contre un mur. Personne n’était disposé à nous répondre. Des rumeurs parlaient d’une possible rupture de stock du papier d’impression qui est semblable à celui des billets de banque : sécurisé et inimitable. Finalement personne n’a pu infirmer ou confirmer cette version.

Certains demandeurs viennent par exemple de Tsévié (à 30 km de Lomé) ou de l’intérieur du pays : Kpalimé (120 km), Atakpamé (160 km). Ceux du septentrion c’est-à-dire à partir de Sokodé (340 km) et encore plus loin ont le choix d’aller à Kara, qui est la deuxième ville du Togo.  Une dame que j’ai vue et avec qui j’ai un peu discuté : « Je viens d’Atakpamé, je ne connais personne à Lomé chez qui je pourrai résider. Je voulais plus d’une copie et je programmais de revenir dans une semaine pour le retrait. Là, je suis toute bouleversée, je ne sais que faire ».  Je vous laisse imaginer toutes leurs peines.

Après le dépôt effectif de la demande, le rendez-vous pour le retrait est fixé pour une semaine après. Au jour dit, je me suis présentée mais n’ai obtenu aucune copie, et aucune raison ne m’a été donnée. Le plus grave c’est qu’aucune nouvelle date ne m’a été donnée pour un éventuel retrait. L’agent préposé au  service affichait une insolence et une arrogance inégalable. Elle criait, non hurlait sur les citoyens comme une orfraie. Enragée je suis repartie. Je n’ai pu avoir mon document que 3 semaines plus tard en passant par l’ami, d’un ami, d’un ami. Sinon mon document serait perdu je ne sais où.

Au commissariat de police

Au Togo, la carte d’identité nationale s’établit dans les commissariats de police. Evidemment pour échapper au monde fou qui en fait la demande, il faut être recommandé par un « grand  quelqu’un », glisser des sous ou se lever très tôt, et là c’est vraiment tôt. Les services publiques ouvrent à 7h30, pour espérer être le premier servi il faut y aller à 5h déjà. Mais là encore vous n’êtes pas au bout de vos peines.

Selon la mouche qui l’a piqué, le policier préposé peut décider de faire passer toute sa famille avant vous, même si vous êtes le premier sur la liste. Et gare à vous, si vous osez protester. Ils vont vous créer toutes les misères et Dieu seul sait si vous retrouverez un jour votre dossier. Alors tout le monde fait profil bas et invoque tous les dieux connus et inconnus, pour passer le plus tôt possible. Vous pouvez être aussi carrément oublié là-bas sans aucune explication et y passer toute votre journée. Vous ne serez servi que dans l’après-midi à la reprise c’est-à-dire à partir de 14h30.

Si vous êtes verni et que votre patronyme n’a subi aucune éraflure (ce qui est très fréquent : des noms mal écrits ou carrément déformés) après deux semaines, vous pourrez avoir votre carte d’identité nationale.

Crédit photo : Bénédicta H.

Au service des passeports

Ce service dénommé officiellement DGDN (Direction générale de la documentation nationale), était le service par excellence où si vous étiez affecté, il fallait coûte que coûte repartir de là, ventripotent. Pendant longtemps au Togo, pour se faire établir son passeport, c’était 10 fois le chemin de croix de Jésus de Nazareth, plus que le parcours de sélection de la légion étrangère, et beaucoup de billets violets**(2) distribués en route.

Mais depuis trois ans au moins, tout a changé, le service a connu son chemin de Damas, je peux dire avec preuves à l’appui que c’est le meilleur service de l’administration togolaise où l’on vous reçoit très bien et on vous met à l’aise. D’abord le lieu-dit est bien protégé, un service de sécurité sans faille. Il est équipé d’un hangar avec des bancs, d’un écran qui vous donne toutes les informations sur le processus à suivre avant de vous faire délivrer le précieux sésame. Il est également équipé  d’un distributeur automatique de snacks et de boissons.

Les agents soucieux de refléter une belle image du pays, vous reçoivent très cordialement vous fournissent tous les renseignements et prennent le soin de vous informer au moindre pépin. Bref, ils fournissent un service impeccable. Aucune œuvre humaine n’étant parfaite, il existe toujours des brebis galeuses qui profiteront de votre crédulité pour vous dépouiller de quelques billets. Ne vous en faites pas, un service existe désormais pour les dénoncer, pour qu’ils subissent de bonnes sanctions avec la dernière rigueur.

Et vous quelle est votre expérience avec les services administratifs de votre pays ?

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*1 000 FCFA : 1,5 Euros à peu près

**Le billet de 10 000 FCFA, la plus grosse coupure est de couleur violette


Essénam ou Croire en soi, un film togolais à l’affiche

Hier après-midi en mal d’inspiration sur un article que je devais écrire et pour me changer un peu les idées, je me suis rappelée que je m’étais promise d’assister à la première de projection de ce film togolais. En effet la publicité est passée sur tous les réseaux sociaux cette semaine et je n’y ai pas échappée.

Prévue pour commencer à 16h, la séance ne débute véritablement que 2 heures plus tard. Mais l’attente a valu son pesant d’or. Et les organisateurs arguant de problèmes techniques se sont excusés.

Ticket d'entrée . Crédit photo : Bénédicta Honyiglo
Ticket d’entrée. Crédit photo : Bénédicta Honyiglo

En tout cas, moi je n’étais pas déçue et cela est évidemment ma seule opinion. Je vais jouer aux spoilers et vous faire le résumé de la séance.

Essenam, jeune fille d’une vingtaine d’année est étudiante dans une école privée de la ville où se déroule l’action. Emportée par ses fréquentations, elle a délaissé ses études au profit de sorties et de beuveries en compagnie de quelques amis d’école issus de milieux bien plus favorisés.

Un matin, outré par les innombrables absences non justifiées de Essénam à ses cours depuis presque 7 mois, le directeur des études, M. Komlan appelle finalement la mère de Essenam. Les études de Essenam étaient financées par son oncle. Habituellement, c’est avec ce dernier que les responsables de l’école prennent  contact mais étant souvent hors du pays,  il était cette fois-ci injoignable.

Malheureusement pour Essenam, le pot aux roses est découvert et sa mère lui coupe les vivres. Un malheur ne venant jamais seul, les affaires de l’oncle subissent une avarie : 2e robinet fermé pour Essenam. Elle doit alors retrousser les manches et faire face à son avenir. Signalons que la mère de Essenam est une vendeuse de kom (pâte de maïs fermenté) ou « komière »… lol, un nouveau mot découvert dans le film. C’est grâce à cette activité, que la courageuse femme fait vivre sa famille tout en payant le crédit de la maison, laissé par son défunt mari.  

Plat de kom, accompagné de petits poissons frits. Crédit photo : Roger M. Lasmothey

Mais ne vous inquiétez pas, Essenam s’en sortira et de la meilleure façon possible.

Le courage, la persévérance, l’abnégation sont les valeurs véhiculées par ce film. Mais aussi la foi, en soi et en Dieu (ou toute chose, en tout cas au-dessus des humains. Evitons la polémique religieuse…lol).

Je vous invite vivement, ceux qui sont à Lomé, bien évidemment, à faire le déplacement lors des prochaines projections. Et à encourager le réalisateur de ce bijou. Précisons que l’équipe technique et les acteurs sont pour une grande partie, des amateurs qui pour un coup d’essai, ont fait un coup de maître.

 


Quand le colibri nous fait lire

La lecture à voix haute est une pratique peu commune dans nos milieux, surtout dans le monde scolaire et à plus forte raison dans une bibliothèque. Lorsque Corinne du blog http://djifa.mondoblog.org/ m’a écrit pour me proposer d’animer une séance de lecture à voix haute, je n’ai pas du tout hésité et je ne le regrette pas.

Notre séance a eu lieu ce samedi 2 novembre 2019, au sein de la bibliothèque le Colibri, située dans la banlieue nord-ouest de Lomé. Avant cette rencontre, plusieurs annonces avaient été faites sur les réseaux sociaux (Facebook, Instagram,…)

Pour cette occasion deux livres ont été choisis : une histoire en français et un conte en éwé (langue parlée dans le sud du Togo et du Ghana).

Cette première séance a rassemblé une trentaine d’enfants de 4 à 10 ans. Afin de les mettre à l’aise et de créer une bonne ambiance, ils ont chanté et dit des poèmes avant que la lecture ne commence.

Après la lecture du premier livre, les enfants très curieux ont posé diverses questions auxquelles j’ai répondues. L’histoire est celle d’un petit lapin, qui est allé chez le dentiste après un mal de dent. Grâce à cette histoire, mes petits auditeurs ont appris de nouveaux mots et enrichis leur vocabulaire.

Pour le conte, les enfants n’avaient pas d’abord bien compris, puisque la littérature ewe utilise une version assez soutenue, parlée seulement par certaines familles et les personnes âgées. J’ai dû traduire dans « un ewe dilué » plus accessible aux enfants de cet âge. Le principal personnage de ce conte est l’araignée. Dans la littérature ewe, l’araignée ou Yivi, est comparable au renard, dans les contes occidentaux, très futé, toujours prêt à jouer de vilains tours à ses congénères.

Les enfants ont été très enthousiastes. Ils réclamaient déjà une nouvelle séance avant même que celle en cours ne s’achève. Nous avons ensuite pris quelques photos pour garder de frais souvenirs de cette rencontre. Un en-cas et quelques rafraîchissements ont été distribués aux enfants pour mettre un terme à ce magnifique moment.

Ce qui est certain, cela est une belle expérience à renouveler.


Eradiquer la pauvreté : mythe ou réalité ?

Au nombre des 17 Objectifs de Développement Durable (ODD),  le premier et non des moindres est l’éradication de la pauvreté.  Une pauvreté  présente sous plusieurs formes, comme dit dans la redéfinition des nouveaux objectifs du programme  de développement post-2015, intitulé « Transformer notre monde : le Programme de développement durable à l’horizon 2030 ». Cependant, l’éradication de la pauvreté passe incontestablement par l’éducation.
Logo de la campagne de la Banque mondiale pour l’éradication de la pauvreté. Source : twitter.com/banquemondiale

Lorsque nous parlons d’éducation, nous parlons de l’acquisition de la connaissance. Et la base de la connaissance est la lecture. Comme je le dis souvent : « Le meilleur cadeau qu’un parent puisse faire à son enfant est de lui apprendre à lire ».  Le savoir se cache dans les livres, dit-on.

La lecture comme solution 

Pour la Banque mondiale, la meilleure stratégie pour vaincre cette inaccessibilité au savoir est de rendre la moitié des enfants de dix ans capables de lire et de comprendre un texte simple d’ici 2030. « Mettre fin à la pauvreté des apprentissages« , selon leurs propres termes. Le temps d’une génération, beaucoup de maux peuvent être résolus, si l’accent est vraiment mis sur cela.

Ce qui permettra effectivement l’atteinte du 4e objectif des ODD : assurer un accès libre et équitable à une éducation de qualité et promouvoir l’apprentissage tout au long de la vie. Car à la Banque mondiale, on considère que « la lecture est le fondement de toutes les compétences. »

Les pays concernés

Tous les pays s’impliquent dans cette lutte, pays en développement comme pays riches où l’objectif 100 % d’enfants de 10 ans capables de lire n’est certainement pas atteint.

Et en Afrique, chaque pays énonce ses soucis et pense aux solutions adéquates.

Pour la Sierra Leone, il s’agira de permettre l’accès aux fournitures scolaires et aux documents en ligne, lorsqu’il est quasi difficile de trouver des manuels physiques, de permettre également de fournir aux éducateurs une formation de qualité pour une meilleure maîtrise des sujets.

Au Ghana, il est préconisé la création de bibliothèques, un appui soutenu aux auteurs de livre et surtout l’implication des parents, en l’occurrence les mères qui seraient le socle de l’éducation. Le rôle de ces mères sera d’intéresser les enfants à la lecture dès le bas âge. Pourtant une inquiétude demeure : certains parents n’ont pas eu la chance d’être eux-mêmes éduqués.

Le Burkina-Faso propose quant à lui de mettre l’accent sur l’apprentissage des langues locales et la formation continue des enseignants.

Au Togo, les solutions sont orientées vers le renforcement des projets financés par le gouvernement grâce à la Banque Mondiale, par la promotion de l’éducation inclusive et l’installation des cantines scolaires. Comme le dit le dicton, « Le ventre affamé, n’a point d’oreilles.» L’on ne peut apprendre en ayant l’estomac vide, lorsqu’on sait  les conditions précaires des populations rurales.

C’est en outre l’une des trois mesures clés que le nouveau rapport sur « la pauvreté des apprentissages » énonce : il s’agit de « faire de l’investissement dans l’humain un enjeu collectif : les systèmes éducatifs ne peuvent tout. Pour être en mesure d’apprendre, les élèves doivent bénéficier d’une alimentation, de soins de santé et d’une prise en charge adaptés pendant la petite enfance. »

Tout en espérant, effectivement que ces objectifs soient atteints en 2030. Qui vivra verra !


Son homme !

Elle lut la notification du nouveau message reçu par son homme. On pouvait y lire : « c’était très bon, tout à l’heure. Merci pour ce délicieux moment ».
Non, non et non !! Ça c’était la goutte d’eau qui allait faire déborder le vase. Pascal ne pouvait se permettre cette ignominie envers moi. Moi, Caroline, l’héritière du seul et unique M. Gator. Moi qui l’ai sorti du ruisseau, l’ai façonné, lui ai ouvert toutes les portes de la bourgeoisie locale. Je vais lui rappeler aujourd’hui ses origines.
– Pascal ! Pascaaal !
Caroline ouvrit, avec fracas, la porte en bois immense de la salle de bain, taillée dans du mélèze, importé du Japon. Un bois pas du tout commun dans le pays.
Après une dure journée de travail, Pascal comme de coutume se prélassait dans son bain aux effluves de lavande et de musc boisé avant de prendre son dîner en compagnie de Caroline. Cela faisait déjà quelques années qu’ils étaient mariés avec deux mignons enfants : Anne-Sophie, 7 ans et Marc-Emmanuel 8 ans.
Elle était tombée sous le charme de ce bel homme, travailleur acharné et intelligent mais pauvre. Et comme tous les jouets que son père avait l’habitude de lui offrir, Caroline avait tout fait pour se marier à Pascal. Ils s’étaient rencontrés au dîner de bienfaisance et de charité que son père organisait chaque année pour récompenser les meilleurs étudiants de l’Université du Pacifique dont il était le parrain.

Crédit photo : Pixabay

Pascal, avait accompagné ce soir-là, un de ses amis, avec qui il avait l’habitude de jouer au basket dans l’équipe locale et qui était étudiant à ladite Université. Lui, parce que ses parents n’avaient pas les moyens, avait plutôt suivi une formation en électronique et jonglait entre plusieurs boulots. Tombée sous son charme, Caroline a tout fait pour que son père l’engage dans un de ses magasins de vente de matériels informatiques. Pascal a vite rattrapé les marches en mettant à profit ces opportunités à travers des cours en ligne.

Après quelques années, Pascal s’est vu offrir un poste de directeur au sein de l’une des entreprises de M. Gator.
– Je sais que je suis jalouse et je lui mène une vie d’enfer mais il n’a pas le droit de me trahir, il est à moi. Je l’aime trop. Je ne peux vivre sans lui. Jamais, il ne me quittera.
Caroline l’avait déjà prévenu à maintes reprises, si jamais il avait l’audace de la trahir, c’est dans un cercueil, six pieds sous terre qu’il se retrouverait.
Surpris par le bruit assourdissant de la porte, Pascal, sursauta dans la baignoire en marbre de Carare.
– Mais chérie ! Que se passe-t-il encore ?
– Je t’ai toujours dit que le jour où tu oserais me quitter, ce serait les pieds devant. Je viens de voir le message de ta maîtresse.
– Laquelle ? Qu’est-ce que tu racontes chérie ?
– Ne joue pas au mariole avec moi !
Caroline avait le téléphone dans la main gauche et un pistolet bien chargé dans la droite, qu’elle cachait derrière elle.
– Je vais te tuer, Pascal, je vais te tuer !
Il sortit de la baignoire pour attraper son costume de bain. Avant même qu’il n’eut le temps de saisir son vêtement, Caroline pointa l’arme sur lui. Au fait de la surprise, Pascal resta la bouche ouverte. Il reçut deux balles dans la poitrine.
Caroline pratiquait depuis des années le tir sportif de vitesse ou handgun. Elle ne pouvait rater son mari. Pascal s’effondra. Une autre notification apparut sur l’écran : « Désolée, je me suis trompée de numéro. Le message précédent n’était pas pour vous. Bonne soirée ! »
Effectivement, malgré toutes les apparences, Pascal était un homme fidèle et bon père de famille. Un immense cri retentit dans la maison.

NB : Ce billet est une réponse au challenge lancé par le blogueur Aphtal.


Portrait – La vie en batik avec Valery

Si je vous dis couleur, teinture et cire ? Vous pensez à quoi ? Je vous le donne en mille : le batik. Et oui ! Allons à la découverte de cette technique de teinture de tissu et surtout de ceux qui en ont fait un métier, pas trop commun.

On la retrouve parmi ses bassines, seaux et pots de teinture ainsi que des mètres de tissu en coton. Elle, c’est Valery, la trentaine, mère de famille. Avec sa marque ValBatik qui fait ses premiers pas, elle nous raconte l’origine de cette passion pour l’art et surtout le dessin qui l’ont conduit sur cette voie.

Une passion devenue un métier

En pleine séance de teinture. Source : Benedicta H.

« Très petite, j’étais intéressée par le dessin et la couture. Je m’exerçais sur la machine à coudre de ma mère et je dessinais aussi. Après ma maîtrise en Histoire Contemporaine à l’Université de Lomé, voguant de stage en stage, je me cherchais sans trouver mon chemin. Grâce au dessin et par des amis, je suis devenue membre de l’ASTAP[1]. Cela m’a permis de côtoyer des personnes formidables et de découvrir des nouveaux domaines du dessin dont le batik. Impressionnée par cette technique, j’ai décidé de l’apprendre et d’en faire un métier. Je me suis donc dirigée vers les artisans du village artisanal de Lomé pour être formée et avoir les ficelles du métier. » Une formation qui a  duré deux années, nous précise-t-elle.

Batik, un monde de couleurs et de courage

Le batik est une technique artisanale de décoration de tissus d’origine javanaise. Elle  consiste à teindre des tissus grâce à de la cire.

A la question de savoir, les qualités pour exercer ce métier, elle répond sans hésiter : la passion. Elle nous confie que le métier est plein de découvertes surtout au moment du mélange des couleurs  et de la confection des motifs.

Palettes de couleur. Source : ValBatik

Faire du batik, est aussi  synonyme d’endurance. Pour confectionner seulement 5 mètres de tissu, le minimum est 2 jours . Il faut d’abord concevoir le modèle à reproduire sur le tissu. Ensuite l’imprimer dessus à l’aide de la cire.  Puis vient l’étape du mélange des couleurs et la teinture du tissu. Et après le séchage .  Le rinçage à l’eau chaude ou au pétrole est l’étape suivante. Un deuxième séchage suit et enfin le repassage.

Notre question sur l’origine des motifs a reçu cette réponse : « Certains motifs sont déjà conçus en bois, d’autres me viennent sur le coup si je suis inspirée, j’essaye aussi d’autres que j’ai vu sur internet et que j’ai envie d’essayer. Parfois des erreurs de mélange deviennent de vrais chefs d’œuvre. Et c’est toujours une agréable surprise de découvrir le résultat. »

Dans son catalogue de fabrication  à part les pagnes, elle nous montre une variété de produits qu’elle conçoit de A à Z : des rideaux, des sets de tables, des tabliers, des taies d’oreiller. Finalement, Valery a aussi pris des cours de couture et elle coud elle-même tout ce qu’elle conçoit.

Rideaux et sets de table. Source : ValBatik

On peut ajouter qu’elle est une artiste complète car elle peint également des tableaux  en batik, mais aussi des t-shirts qu’elle achète et teint pour le bonheur de ses clients.

Que réserve l’avenir ?

Le projet de Valery, est de faire de sa marque, ValBatik une marque connue dans le domaine de l’habillement et du linge de maison au Togo, dans la sous-région et pourquoi pas dans le monde. Et de sortir dans quelques années, une ligne de vêtements pour hommes, femmes et enfants, avec la création d’emplois.  En attendant, elle développe un nouveau créneau, des écharpes en bi-matière : de la laine et du coton, soit en batik, soit en wax. « Nous savons tous  que le wax a pour origine le batik[2] indonésien », nous précise-t-elle.

Assortiment d’écharpes. Source : Valbatik

« Le batik est un domaine sans fin qui n’a pas fini d’être exploité, nous sommes 7 milliards sur la terre, et tout le monde a au moins chez lui quelque chose en tissu », nous confie Valery avec le sourire. Une phrase pleine d’avenir et d’espoir, pour cette jeune marque. Bon vent à elle !

ValBatik Source : ValBatik

[1]ASTAP (Association Togolaise des Artistes Peintres)

[2]La technique du batik importée dans le monde par les hollandais, est l’ancêtre du tissu wax. Le wax signifie cire en anglais.